Vincent Dieutre

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Dedicato a Sakis K. - Installazione

La Galleria Nuvole ospita l'installazione di Vincent Dieutre: Dedicato a Sakis K.

Nelle parole che seguono lo stesso artista parla delle motivazioni che sono state all'origine delle sue emozioni e del suo lavoro.

Tutto è cambiato, evidentemente. Tutta Europa oscilla nella crisi e qui, in Grecia, tutto sembra sospeso… Torno a Tessalonica trent’anni dopo. Oggi faccio il regista e mi hanno invitato a mostrarne uno all’Olympion. Ho riconosciuto il luogo, la piazza Aristotele… Trent’anni dopo ritrovo la città in cui sono stato amato per la prima volta, amato fisicamente, carnalmente. Ero pazzo di Sakis. È stato lui a scegliermi, ad eleggermi, a Parigi, dove studiava. A vent’anni, non mi era mai successo niente di simile. Giunta l’estate, l’avevo seguito da Paros fino a Tessalonica. Sakis era nato lì, e lì vivevano i suoi genitori. Appartamento immenso, palazzo recente, bisognava stare attenti, nascondersi, imparare a far l’amore, dolcemente. Era divertente, era meraviglioso… Non ricordo più troppo né della città e del quartiere né della casa agiata e vecchiotta della sua famiglia… la memoria vacilla… Mi ricordo dei suoi occhi: gli occhi grigi di Sakis che mi aveva scelto. Costeggio Paralia e osservo dalla nave Tessalonica in crisi che sprofonda nella notte. Oggi, in città, tutto mi parla: gli androni di palazzi anonimi, alcuni volti, certi sguardi, persino dei suoni. Ogni sensazione convoca un ricordo concreto o sognato, reinventato... Negli anni Novanta ho rivisto Sakis, mi voleva parlare. Abbiamo parlato, a Parigi. Ma in quel momento vivevo con Georg, e non ho capito. L’ho respinto. Avrei dovuto prenderlo tra le mie braccia. È morto di AIDS a Tessalonica, forse senza tutte le cure necessarie, ma protetto da sua madre. Forse lei è ancora lì, in uno di quei palazzi, ma… No, non servirebbe a niente. Tutto quel che posso fare è parlarvene. Dedicare a Sakis K. che mi aveva scelto un memoriale fatto di lacrime, immagini, suoni.

 

Vincent Dieutre

Tout a changé, évidemment. L’Europe entière bascule dans la crise, et ici en Grèce tout semble en sursis... Je retourne à Thessalonique, trente ans après. Aujourd’hui, je fais des films et l’on m’a invité à en montrer un à l’Olympion. J’ai reconnu l’endroit, la place Aristote... Trente ans après, je retrouve la ville où j’ai été aimé pour la première fois, aimé physiquement, charnellement. Moi, j’étais fou de Sakis... C’est lui qui m’avait choisi, élu, àParis où il étudiait. À vingt ans, cela ne m’était jamais arrivé. L’été venu, de Paros je l’avais suivi jusqu’à Thessalonique. C’est là que Sakis était né, là où vivaient ses parents. Appartement immense, immeuble récent, il fallait être discrets, se cacher, apprendre à faire l’amour, en douce. C’était drôle, c’était merveilleux... Je ne me souviens plus très bien, ni de la ville, du quartier, ni de l’intérieur cossu et vieillot de sa famille... La mémoire vacille... Jeme souviens des yeux : les yeux gris de Sakis qui m’avait choisi. Je longe la Paralia et observe du bateau Thessalonique en crise qui plonge dans la nuit. Aujourd’hui, en ville, tout me fait signe : les halls d’immeubles anonymes, certains visages, certains regards, des sons aussi. Chaque sensation convoque un souvenir concret ou rêvé, réinventé. Trente ans, c’est long, ce n’est rien. La mémoire flotte, disponible, menteuse. C’était l’été 1981, Mitterrand venait d’être élu en France et Sakis, le beau Sakis aux yeux gris m’aimait, enfin, me désirait. Où ? Dans quelle rue ? Cette entrée toute de marbre et de cuivre me dit quelque chose. Pénétrer un homme, être pénétré pour la première fois, ça compte, ça vous construit...C’était dans le salon, contre le mur... Puis dans la bibliothèque. Je vois des livres, en grec... Les parents dormaient. Quelque chose comme une promesse de bonheur incroyable, une bousculade de possibles. Dans les années 90, j’ai revu Sakis. Il voulait me parler. Nous avons parlé, à Paris. Mais je vivais alors avec Georg, et je n’ai pas compris. Je l’ai éconduit. J’aurais dû le prendre dans mes bras. Il est mort du Sida à Thessalonique, sans tous les soins nécessaires peut-être mais protégé par sa mère. Peut-être est-elle encore là, dans un de ces immeubles mais... Non, ça ne servirait à rien. Tout ce que je peux faire, c’est vous en parler. Élever à Sakis K. qui m’avait choisi, un tombeau de larmes, d’images et de sons.»

 Vincent Dieutre

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